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Par Anne le 24/02/2023

Domaine Terra di Catoni

©Corse Matin ©Corse Matin
Christian Mons-Catoni a une destinée entrepreneuriale hors du commun et un parcours de vie exceptionnel. Rencontre avec un Cap Corsin affable, jovial, attachant et dynamique.

UN PARCOURS DE HAUTE VOLEE

En 1964, alors qu’il n’a que 19 ans, Christian Mons-Catoni obtient sa licence de droit à Paris et est rapidement animé par une forte confiance en lui qui le catapulte vers une vie professionnelle trépidante. En 1966, il est imprimeur, en 1970, il devient pilote professionnel de course automobile puis directeur de l’école de pilotage Winfield à Magny-Cours, durant quatre ans. Il rentre ensuite chez SOGITEC, société d’ingénierie en aéronautique et filiale de Dassault. A la suite d’un contrat de vente de Mirages 3 à l’Australie, il est chargé de traduire en anglais et de mettre aux normes des séries de documentations techniques. Reconnu pour ses hautes valeurs stratégiques, il continue avec des films de maintenance, des simulateurs, des générateurs synthétiques d’images, et en 1983, il rentre chez Dassault. Son énergique esprit d’entreprise l’emmène à diriger pendant cinq ans la filiale française du constructeur américain de supercalculateurs Control Data (CEA Méteo). En 1989, il est recruté Chez Thomson-CSF et s’occupe pendant douze ans, d’électronique embarquée, de gazoduc, de systèmes informatiques de défense pour le porte-avion Charles-de-Gaulle, d’infogérance et de maintenance applicative… Il poursuit son ascension professionnelle en rejoignant pendant cinq ans la société « Transiciel », entreprise de services du numérique. En 2000, il achète avec son associé homme d’affaires Georges Cohen la société « Auverland », constructeur automobile français tout terrain puis « Panhard », constructeur de véhicules militaires qu’il revendra ensuite à Volvo. Pour parachever son œuvre professionnelle, Christian Mons-Catoni, fut un temps élu à la présidence du GICAT (Groupement des Industries Françaises de Défense Terrestre).

 

LE CAP CORSE, SA TERRE NATALE

Christian souhaitait reconstruire le domaine familial et le mettre en valeur pour le léguer à ses trois filles. Dans les années 1996, il commence à reprendre l’exploitation des oliviers quatre et cinq fois centenaires, de variété « Capanaccia ». En 2000, il entreprend de récupérer les terres familiales dispersées dans les successions. Il rachète à ses cousins tous les lots de l’indivision et s’emploie à remembrer et restructurer les 25 hectares du domaine initial. En 1812, ce gros domaine au bord de la mer était très rare. Les oliviers et la vigne y régnaient en maîtres. Les terrains furent abandonnés au moment du phylloxéra et furent oubliés pendant un siècle, le maquis reprit ses droits et la végétation inextricable s’installa sur les escarpements rocheux des deux cents mètres d’altitude du domaine. L’année 2005 a vu débuter un travail manuel titanesque, repartir du maquis, d’une terre vierge pleine de rochers et tout créer ! Première étape creuser la route avec des pelles de 35 tonnes, dans la roche jusqu’au sommet de la colline, tarauder, dessoucher, pulvériser, dynamiter, excaver, pour obtenir des surfaces planes et régulières nécessaires à la plantation de la vigne. En 2010-2012, la préparation du sol durera trois ans, trois ans de plus seront nécessaires pour planter, et il faudra attendre encore trois ans pour les premières vendanges et le premier vin !

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À LA DÉCOUVERTE DE SON ŒUVRE

Ce beau domaine est référencé en IGP Ile de Beauté. Il culmine, face à l’archipel toscan, à deux cents mètres au-dessus de la mer Tyrrhénienne sur un dévers abrupt d’environ 50%. Nous embarquons dans un pick-up rodé à l’escalade, en compagnie de Christian Mons-Catoni, propriétaire des lieux, vigneron jovial et de son inséparable caniche abricot « Chica ». Nous progressons lentement à la verticale, cahin-caha, malmenés par la piste et émerveillés par le panorama qui s’offre au fur et mesure de l’ascension. Le chemin cabossé de terre rouge serpente dans le maquis sur cinq kilomètres et monte graduellement vers le haut plateau. Nous

longeons des plants de Sciaccarellu, des pieds de Sauvignon, de Vermentinu, et de Viognier qui a remplacé le Muscat à petits grains, car Christian souhaite se singulariser dans sa production de vin « Je ne veux pas faire des vins comme tout le monde ! ». Inspiré par les vignerons toscans, il a souhaité planter comme eux, le cépage du Val de Loire, malgré le manque d’eau. « Il faut être fêlé pour faire du sauvignon surtout en coteaux ! En 2017 pas de récolte à cause de la grosse sécheresse ! Il n’a rien produit. Maintenant le sauvignon est planté profond. Il aura fallu douze ans pour qu’il s’adapte au terroir ! » Il envisage aussi de planter, quatre hectares de cépages rouges autres que le Niellucciu, pour cela, il suit le travail du CRVI.

 

UN DOMAINE EN AGRICULTURE BIOLOGIQUE

Le 4x4 s’immobilise enfin sur le plateau supérieur, la vue est magnifique sur les dégradés de vert des cultures en terrasses et le bleu de la mer baignée par le soleil.

Adossés aux fabuleux blocs de schiste, poussent de jeunes plants de Genovese sur un sol en tri-couches de marnes, schiste dégradé et fond argilo-schisteux. Les rangs enherbés de fèverole, d’inule visqueuse, côtoient le ciste mauve et blanc à feuille de sauge, l’arbousier et le lentisque complètent la biodiversité du biotope. Nous regardons la vigne qui se développe. La rangée de droite où il y a peu de terre a été taillée en pente, elle s’est peu développée tandis qu’à gauche dans le talus, elle se déploie et prend son temps pour pénétrer le sol.

« Cette année, on a mis de la féverole pour fixer l’azote dans les racines et du fumier de brebis. Ainsi, on arrive à avoir pas mal de matières organiques. La vigne est belle et commence à faire ses fruits. L’altitude et les brises aident à lutter contre le mildiou. On a passé la broyeuse sur une terre quasi stérile, on a ainsi réussi à l’enrichir ».

 Christian est intarissable sur la conduite du vignoble. « Labourer c’est aberrant ! » c’est méconnaitre la typologie de la vigne qui a une racine tourbillonnante très profonde. Ne pas tuer la vie du sol en labourant, respecter le substratum, les vers, le mycélium…

 Le panorama s’ouvre sur des terrasses de vignes complantées de haies de cyprès qui rayonnent les espaces de traits verticaux et cassent les horizontales chaloupées ! Parce que c’est esthétique, Christian s’est inspiré des perspectives toscanes, car en Italie les cyprès sont partout !

 Étayant ses propos, il trace dans l’air « tac, tac, tac, tac » de petits traits droits qui viennent dessiner les paysages. Au milieu du versant, en contrebas, se trouve un sorbier majestueux, un pin parasol, des figuiers… Ici pas de monoculture !

Nous apercevons les toits des maisons rouges et bleus, les cabanes à outils des ancêtres ont été reconstruites avec les pierres extraites du sol pendant le démaquisage et le défoncement du sol, pour en faire les maisonnettes du hangar, du chai, de la boutique, du restaurant. Tous les travaux de construction ont été réalisés par le propriétaire et l’un de ses employés, maçon de métier. Le forage à 110 mètres de profondeur descend au niveau de la mer et dessert en eau toutes les habitations du domaine. Les murs de pierres taillées ceinturent des kilomètres de terre sur lesquels les vignes s’épanouissent aujourd’hui librement.

Au XIXe siècle, le blé noir semblable au seigle y était cultivé et l’aire de battage se trouvait à proximité. Les habitants du cap vivaient en autarcie, ils n’achetaient rien. Christian se souvient des paroles de sa grand-mère « Ils n’achetaient que le fil et le coutil »… « Tous les moulins du cap étaient des moulins à blé, le Moulin du Cap Corse Mattei, ceux de Macinaggio et de Morsiglia.

 Le dernier à Cagnano, possède trois meules, la première pour les olives, la deuxième pour la farine de châtaigne et la troisième pour le blé ou le maïs ». Nous reprenons la piste, nous croisons des lapins et des perdreaux, « Chica » aboie, les sangliers ne sont pas loin ! Ils labourent la terre avec rage, ils sont une catastrophe pour la vigne à l’époque des vendanges ! Le pick-up négocie un virage en montée, chaotiquement serré, et nous arrivons devant le verger de 1950-1955, les oliviers argentés offrent leurs frondaisons au soleil. Incendiés il y a cinquante ans, les arbres ont été retaillés et ils ont repoussé sur les racines anciennes.

La Capanaccia pousse très doucement, cette petite olive identitaire du Cap Corse, récoltée sur filet, donne une huile très aromatique et sapide sur le fruité noir très mûr. Notre guide mouline sa récolte chez son ami François Andreani à Folelli. Certifié en AB par l’InterBio, le Moulin est autorisé par le syndicat Oliu Di Corsica à presser les olives du Domaine Catoni.

En contrebas, un jardin luxuriant détonne avec un vieux bananier aux larges feuilles vernissées, des figuiers torturés, des orangers chargés de fruits et dans les herbes hautes des multitudes de papillons. La progression véhiculée lente et agitée, nous emmène tout droit sur le nid de quatre Panhard escamotés, reclus dans les feuillages qui nous observent… Ils servent toujours sur le domaine.

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UNE MAGNIFIQUE CAVE

Nous parvenons au sublime chai dont l’architecture se fond dans le paysage. A l’intérieur un formidable bric-à-brac de cuves inox, pressoir, étiqueteuses et autres cartons conditionnés, nous accueille.

Les cuves de 20 hl contiennent les vins blancs 100% sauvignon, 100% vermentinu et/ou leur assemblage tandis que les cuves de 10  hl protègent l’huile d’olive qui sera embouteillée sur place. Environ 15 000 à 20 000  bouteilles sont produites annuellement, dont 6 000 de « Pet Nat » et un vin rouge frais de Sciaccarellu. Le credo du vigneron se positionne sur des vins très originaux, tant dans le choix des cépages, de la méthode de vinification, de l’élevage, du vieillissement, que sur le choix de la bouteille et de la capsule.

L’assemblage « Millete » 2019 Sauvignon-Vermentinu, se patine lentement sur ses lies en cuve de 14  hectolitres. On le trouve actuellement à la vente dans la boutique avec le Sauvignon 2018. Les vins sont élevés un minimum de deux ans en cuve inox, embouteillés non filtrés, ils séjournent un an dans une tente dans la vigne, avant la commercialisation. Les Pétillants Naturels « Pet Nat » en blanc ou rosé, non filtrés n’attendent pas. Ils sont embouteillés en flacon de « Prosecco » avec des capsules à vis, mis en cartons puis sur palettes et rapidement commercialisés.

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PLUSIEURS CORDES A SON ARC !

Son huile d’olive et ses vins ont l’exclusivité des boutiques et restaurants Terra di Catoni.

 Deux belles épiceries fines de Porticciolo et Erbalonga sont achalandées en productions locales et artisanales, fromages, charcuteries, légumes de saison, confitures variées, biscuits, en boissons, vins, bières, apéritifs, liqueurs et eaux de vie et proposent à la clientèle des produits cap corsins authentiques.

Les trois restaurants de Porticciolo, Erbalonga et Macinaggio offrent, en plus des produits de la boutique, une carte de mets simples et goûteux. Le personnel est accueillant et serviable. Un quatrième restaurant devrait prochainement ouvrir à Bastia.

Enfin un projet d’envergure devrait voir le jour à Meria, en avril 2024, un Hôtel & Spa 4 étoiles. Il sera doté de dix-huit chambres « zen » et huit piscines. Le concept tient en deux mots : œnotourisme et œnothérapie, inspiré des Fermes de « Caudalies » en Aquitaine, le spa proposera la ligne de cosmétiques « Sarmence » issus des vins du Domaine Abbattucci et le restaurant sur le rooftop, à la vue imprenable sur la mer, proposera une carte axée sur la diététique, la forme, le bien-être et la nature.

La visite du domaine est surprenante et le guide passionné vous emmène hors du temps en pick-up, au sommet d’une colline escarpée et verdoyante, à 200  mètres d’altitude au-dessus de la mer ! Vous pouvez demander un forfait pour la journée incluant balade, déjeuner et dégustation de spécialités corses.

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DEGUSTONS !

« Pet Nat Rosé » Prestu Edition Limitée 2021

Ni filtré, ni dégorgé, il contient des lies naturelles qui enrichissent le bouquet de ce Sciaccarellu. Robe brillante au cordon de mousse très dense, nez frais, bouche vive et fruitée sur la bigarade, finale saline. Accord : terrine de sanglier aux noisettes et au muscat et Coppa.

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« Pet Nat Blanc » Prestu Edition Limitée 2020 « ANDANTE »

Ni filtré, ni dégorgé, il contient des lies naturelles qui enrichissent le bouquet de ce Vermentinu. Jolie robe dorée, pétillance fraîche, nez beurré, notes d’agrumes. Accord : fromages de chèvre

 

« Sauvignon 2018 »

Robe or brillante, nez curcuma, noix, agrume, vivacité et salinité caractérisent ce sauvignon qui réveille. Accord : assiette de fromages de brebis au lait cru.

 

Huile d’olive Terra Di Catoni

Récolte à l’ancienne. Belle onctuosité, notes d’artichaut cuit, finale anisée douce et équilibrée sur l’amande fraîche. Accord : assiette de fromages de brebis et chèvre, filet de rouget grillé tomates cerises confites, coppa.

 

Domaine Terra di Catoni

Lieu-dit Porticciolo, 20228 Cagnano

Tél. : 04 95 46 00 14 - 06 24 90 85 12

www.terradicatoni.com

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